Participation au livre d’un couple témoignant de l’accueil au sein de leur famille d’enfants porteurs de handicapés.
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Extrait
— Bonjour. Enchantée. M’appelle Anaë, et toi ?
— Moi, c’est Bruno.
— Trop beau. M’a Anaë. Ana’. Ananas. Banane.
Et de s’esclaffer. Faisant rire par la même occasion son interlocuteur. Ainsi notre fille accueille-t-elle tout visiteur, dans une confiance désarmante. Il suffit qu’elle sente l’attention qu’on porte à la comprendre pour qu’elle continue sur sa lancée :
— Suis momique. M’a, dis comme ça. Le v’ai mot, c’est dur à dire ! Momique comme mes copines Coco et Patate et comme Sasha aussi… Suis arrivée dans ma famille, j’avais 6 ans ! J’ai quat’e frères… Mes frères, je les aime fort, fort comme le soleil ! Suis avant-dernière… Le dernier, c’est Élouan. Il était là avant moi… il m’aime trop, mais y me fait aussi la misèèèère… Mon frère Timéo, il me fait tout le temps des blagues… Mon frère Manoë, il est tout le temps dehors. Il aime faire pêche et ski ! Mon frère Vincent… est arrivé après moi… mais c’est le plus grand. Mes parents l’ont a’opté comme moi… Y sont fous mes parents. Ils font rien comme tout le monde ! M’a suis ‘E2. Tout, tout temps dans livre. Vais montrer.
Et là, si on l’interrompt, ne serait-ce que parce que ce n’est pas le moment, elle l’accepte sans peine, passe à une autre activité, vivant pleinement le moment présent. Ainsi est-elle Anaë : spontanée, naturelle, sans fausse pudeur, sans retour sur soi, même lorsqu’elle parle d’elle-même. En sa présence, le cœur triste retrouve la joie de vivre. Elle tue tout cynisme, toute désespérance. Son innocence tue l’hypocrisie, le cœur blasé de la vie. Elle nous apprend à être humains, tout simplement.
